25.3.13

Le Lynx de St-Germain. . .





Vivait dans un village de jeunes gens parmi les vieilles gens, ils leur arrivaient de se retrouver au centre commun-au-taire de la paroisse. Les vieilles gens donnaient à danser aux plus jeunes. De tout âge ils venaient à pieds ou en voiture, nu pied ou avec des chaussures et ils dansèrent ainsi des années et des années durant. À chacune des soirées de nouvel gens s’invitaient parmi les habitués. Un soir, je m’y suis rendu avec mon troubadour de tout les jours qui eu grand plaisir à m’étourdir dans un ‘’faite swinguer votre compagnie’’, ce bougre de chéri me donna le vertige à ne plus pouvoir poursuivre les sets carrés.

Quelques temps plus tard…les souvenirs s’estompèrent peu à peu, hors il me fallait revenir à la dance du village, sans troubadour je n’aurais osée m’y rendre seule, mais voilà qu’une brave amie s’invita avec joie. Nous étions des plus nombreux, jeunes gens avec leurs petits parmi les vieilles gens, un beau mélange de jeunesse et de sagesse. J’ai donc fais swinguer cette amie, à travers les rires et directives nous avons dansées à en perdre la raison, le corps transpirant, le cœur triomphant et tout le reste en libération….! Mais il me fallait encore danser et c’est à ce moment qu’une grande jeune femme esseulée demanda qu’on lui trouve un partenaire et je me suis portée volontaire!

Sur le coup je n’avais pas réalisée que je n’étais point un homme et une fois devant cette grande-jeune-femme de deux mètres de haut par un mètre de large, je me suis excusée d’être aussi petite tout en lui laissant le loisir de choisir un homme à sa mesure, mais voilà, aucun mâle ne se manifesta. Embêtée elle me signifia qu’elle n’avait pas d’autre choix que d’accepter ma compagnie, elle aurait pu jouer le rôle de l’homme mais non, elle tenait à demeurer la femme de circonstance. Voilà que la dance reprit de plus belle, je m’efforçais de tout mon être à devenir le mâle de service, avec force et vigueur je la fis virevolter de tout côtés, épuisée mais oh combien heureuse d’être de retour à la dance où les femmes au centre et les hommes autour, changions joyeusement de partenaire en saluant notre compagnie…aux rythmes des violons et accordéons, la géante riait de bon cœur, et moi je n’avais plus idée de qui j’étais.

Suite à quoi, je suis sortie dehors. De gros flocons de neige fondaient au contact de mon corps brûlant, j’étais dans un état d’éveil de tout mes sens, allumée, illuminée tel un majestueux sapin digne du temps des fêtes, voilà que je me dépouillais lentement de moi-même. La fatigue m’avait quittée tout comme ma féminité, j’étais devenu vigoureux et courageux, un bûcheron prêt à bûcher toute la nuit pour peu qu’on ne me signale point mes attributs féminins. Mais voilà que la neige tombant du ciel purifia d’un coup mon être tout entier, l’homme que j’étais devenu se transforma en lynx, je n’étais plus humaine. Intrigué par cette sublime transformation tout en ignorant ce qui venait de se produire, l’instinct animal aux aguets m’entraîna au cœur de la forêt, à travers le temps et l’espace, je n’étais plus.

Dans cette peau de lynx silencieux tout m’apparaissait différent, la nature habitait ma chair, des odeurs nouvellement sentis, des visions infinies d’un monde émergeant, le Grand Mystère me donnaient à voir une lumière plus éblouissante qu’un million de soleils. En mon centre commun-nos-terres les secrets des systèmes magiques disparus se mirent à danser sous mes yeux. J’avançais doucement sur un manteau de neige, mes pattes agiles et légères foulaient avec grande habilitée le sol hivernal de cette forêt boréale. J’écoutais ce silence rempli de vie, j’humais l’éther ambiant …dans ma peau de félin nordique rien n’avait plus d’importance que d’être au cœur du vivant. Curieusement, persistait en moi cette conscience d’être aussi un être humain et …le vent se leva et se leva si haut que toute mon attention se dirigea vers la cime des majestueux conifères dansant, eux aussi, avec les étoiles du ciel, étourdie par la puissance de ce vent du nord, ivre d’ère pure, je fini par m’endormir dans un lit de cèdre. À mon réveil, j’étais redevenue cette femme vivant dans un village de jeunes gens parmi les vieilles gens mais un doux souvenir m’habitait, une neige floconneuse, une odeur d’humus et de conifère et cette étoile plus scintillante que jamais, cette géante pleine de rire en cascade, cette femme joyeuse d’avoir pu entrer dans la danse.